Apparemment, c'est en voie de devenir une marotte détestable, chaque fois que le peuple, lorsqu'il est consulté, s'exprime contre l'intégration européenne, les résultats sont systématiquement foulés aux pieds.

Le 6 avril 2016, le peuple néerlandais était appelé à se prononcer par voie de référendum sur l'accord de coopération UE/Ukraine, et le rejetaient à 61,1%.
Il n'aura fallu qu'un an pour que le gouvernement de Mark Rutte, appuyé par le Conseil Européen, piétine la volonté souveraine du peuple néerlandais au titre de défendre la « stabilité du continent ».
Pour obtenir une une majorité au Sénat, après avoir obtenu l'aval de la chambre basse le 24 février, il n'a pas hésité à aller ratisser tantôt dans la majorité (libéraux et des sociaux-démocrates), tantôt dans l'opposition (chrétiens-démocrates).
Cet épisode n'est pas sans rappeler le précédent du référendum de 2005 sur le Traité établissant une Constitution pour l'Europe. Le 1er juin 2005, les citoyens néerlandais, qui étaient appelés à répondre à la question « Êtes-vous pour ou contre la ratification du Traité établissant une Constitution pour l'Europe par les Pays-Bas ? » avaient répondu « non » à 61,54%. Deux ans plus tard, le Traité de Lisbonne était adopté par voie parlementaire, foulant aux pieds le résultat du référendum.
Pourtant, si aux Pays-Bas les référendums ne sont pas juridiquement contraignants, « Tous les partis se sont engagés à suivre le vote populaire si la participation atteint 30 % et si le résultat est sans ambiguïté, c'est-à-dire si le pour ou le contre réunit au moins 60 % des suffrages. »
Que faut-il en conclure ?
La démocratie européenne aujourd'hui, c'est que vous avez le droit d'être d'accord avec les options proposées, mêmes quand manifestement elles ne correspondent nullement à vos aspirations. Vous avez même le droit de ne pas être d'accord, encore que ce soit extrêmement mal vu; mais dans ce cas (et dans votre intérêt, même si vous n'êtes pas capable de le comprendre), on se dispensera de tenir compte de votre opinion, même s'il se trouve qu'elle était majoritaire.
Un projet voué à l'échec
On n'exige pas l'adhésion, on la suscite, ou on la sollicite, mais dans tous les cas, on doit la mériter. Une « démocratie » dans laquelle on va systématiquement à l'encontre de la volonté populaire n'est pas une démocratie, mais une dictature qui avance masquée. Et cela devient de plus en plus clair pour tout le monde.
Une fois de plus les médias se mettent en quatre pour vanter les mérites de cette grande avancée :
Le traité d'association avec l'Ukraine, principal levier de la politique de soutien de l'Europe à ce pays en proie aux tentatives de déstabilisation de la Russie, n'aurait pu entrer en vigueur définitivement. (Les Echos)
Et pour qualifier les tenants du non de « groupuscules aux accents anti-européens»
Sonné par son échec au référendum d'avril 2016 initié par un groupuscule aux accents anti-européens, Mark Rutte avait cherché la solution auprès de ses camarades du Conseil européen qui l'ont gratifié en décembre 2016 d'une décision qui ne modifiait en rien le traité négocié, mais en précisait l'interprétation. (Les Echos)
Utopie ou dictature de l'ordolibéralisme ?
Ce qu'on nous a longtemps vendu comme une utopie, un grand projet destiné à unifier les peuples, à empêcher les guerres et à amener la prospérité et la justice sur le continent européen s'est avéré être un fiasco. Pire, il s'est révélé un projet de domination du capitalisme le plus sauvage au service des seules multinationales, au détriment des peuples. Le taux de chômage n'a jamais été aussi haut, particulièrement chez les jeunes, la situation financière des États continue à se dégrader, la zone euro est au bord de l'explosion, et les rats commencent à quitter le navire...
Mais les bourses se portent bien, merci pour elles ! Les bénéfices n'ont jamais été aussi plantureux, les dividendes coulent à flot tandis qu'on délocalise tant et plus. Eh oui, puisque vous ne voulez pas gagner autant qu'un chinois ou un slovène, on est bien obligé d'aller installer nos usines là-bas, vous comprenez ?
Mais il est trop facile de dire que c'est la faute du système. Nous sommes tous responsables de cette situation autant que nous sommes. C'est parce que nous sommes des veaux qu'on nous traite comme du bétail. Les gouvernements européistes, vendus au grand capital, ne peuvent piétiner la volonté populaire que parce que celle-ci se trouve sans bras, sans jambes, et sans voix ! Et s'il n'y a personne pour y trouver rien à redire, alors pourquoi se gêneraient-ils ?
Comments
Faute à la masse, mais pas que...
Bonjour et merci pour cet article auquel j'adhère totalement.
Je voudrais tout de même ajouter quelques éléments. Car si je suis d'accord sur le fait que la masse joue un rôle dans ce qui lui arrive (et j'en fait partie hein), il y a plusieurs raisons à cela et cela ne serait sans doute pas possible sans l'aide de certains acteurs selon moi.
Car il ne faut pas s'y tromper! Si la masse, aujourd'hui, est devenue inerte à tant de mépris, c'est surtout dû à sa fragmentation. De nombreuses opinions se sont faites jours et se sont manifestées au travers de nombreuses associations, y compris critiques à l'égare du système européen tant et si bien qu'il est devenus compliqué de se rassembler et de faire barrage efficacement contre ses atteintes à l'intérêt général. C'est, selon moi, le retour de baton des luttes passées en vue de reconnaître telle ou telle composante de notre société (femme, personnes de couleur...). Je ne dis pas par cela que je suis contre ce qui a été fait, mais ce phénomène c'est amplifié avec le temps, renforçant l'individualisme et donc l'incapacité des gens à se rassembler largement lorsque l'intérêt général est menacé ou bafoué.
De plus, nos vies sont organisées de sorte à ne pas nous permettre de réfléchir de façon profonde aux travers de notre société entre un boulot qui en demande toujours plus et/ou une famille a gérer par exemple, on a pas toujours le temps nécessaire à la réflexions ou encore moins de s'investir dans un groupe politique. Les divertissement, qui n'ont jamais été aussi nombreux et séduisant qu'à notre époque n'arrangent pas les choses tout comme internet qui, bien plus que de rassembler les gens... les isolent. C'est ainsi qu'une part des gens finissent par déléguer leur vision de l'intérêt général à d'autres malheureusement.
Il ne faut pas oublier que ces gens qui agissent contre l'intérêt général sont également ceux qui font les règles (les lois) qui renforcent ce phénomène. Tant et si bien, d'ailleurs, que d'enfreindre certaines lois sera sans doute un jour une question de survie peut-être, mais je ne l'espère pas.
Quid des médias qui nous déversent leurs sornettes et leur propagande creuse, ne se privant pas de dénigrer et de détruire toute idées qui s'écartent du droit chemin, un peu comme l'inquisition en son temps. On en a suffisamment parlé sur ce blog d'ailleurs.
L'enseignement aussi qui n'apprend certainement pas avoir un esprit critique, mais un esprit docile et bien comme il faut pour être comme il faut.
Enfin les syndicats jouent un rôle clé dans cette inertie maîtrisée via, d'une part, l'encadrement des vieux tromblons de la lutte sociale, trop âgés et sans doute trop démotivés pour entreprendre quoique ce soit et, d'autre part, des "sorties" ou manifestations dans des timing tellement mal foutu que cela contribue à leur érosion autant qu'à leur inefficacité. Ne se préoccupant que peu des nouvelles génération de travailleurs qui arrivent, pas du tout enseigné sur leur droits alors que leurs devoir, eux, sont gravés au fer rouge. Cela contribue à l'inertie de la masse car cela démotive les gens, leur donnent le sentiment que ces actions sont veines.
Dans un contexte pareil, il n'est donc pas étonnant de constater l'inertie de la masse, certes, elle à une responsabilité, mais tout est fait pour que cette masse ne sache pas prendre ses responsabilités et de se laisser tondre dans cette société de servage 2.0 qui est la nôtre.
Cordialement,
Vos précisions
Bonjour Bertrand,
Je partage entièrement votre point de vue sur la fragmentation de la population aujourd'hui et la quasi-impossibilité qu'il y a de rassembler celle-ci sur une problématique donnée.
Là où je crois que vous êtes dans l'erreur, c'est que vous semblez penser que c'est là une forme de fatalité ou d'évolution « normale »... Il n'en est rien, c'est au contraire voulu ainsi, et c'est le principal outil d'asservissement de la population désormais.
Oh bien sûr, tout le monde est mécontent, mais tout est fait pour que Pierre ne puisse pas partager (totalement) le point de vue de Jacques qui ne partage pas exactement l'avis de Paul.
Prenez l'exemple parfait du « confusionnisme ». Désormais, avoir publié (il y a des années) un article d'un journaliste très connu, mais qui aurait, entretemps publié quelque chose qui serait jugé « complotiste » vous vaut, à vous, d'être classé... complotiste. Vous voyez où je veux en venir ?
Les éditeurs alternatifs sont tétanisés de trouille et n'osent plus rien publier, plus faire aucun lien vers d'autres sites, de peur qu'un jour, ceux-ci soient marqués au fer rouge et que par ricochet, eux le seraient aussi.
Accepter cette situation c'est accepter de jouer au monopoly avec les règles imposées par l'adversaire. Désormais vous ne pouvez lancer qu'un seul dé, vous ne recevez plus de bonus en passant le start, et la banque est dévolue au seul banquier, votre « adversaire ».
Autant aller au combat avec des cailloux contre des M4. Ah oui, j'oubliais, dans certains coins du globe c'est courant, et on a le culot d'appeler ça une « guerre », là où je ne vois qu'une boucherie.
Tout est fait aujourd'hui pour qu'aucune force d'opposition digne de ce nom ne puisse émerger. C'est par exemple toute la raison d'être d'un parti comme le NPA. Empêcher l'émergence d'une gauche vraie, radicale au sens premier du terme. C'est une invention de la CIA, et c'est drôlement efficace. À ce titre vous aurez remarqué que ces partis « trotskystes » prennent systématiquement fait et cause pour les guerres otanesques contre les peuples du Moyen-Orient, or il ne faut pas être clerc de notaire pour comprendre qu'un authentique communiste s'y opposerait avec la dernière énergie.
Merci pour votre réponse dont
Merci pour votre réponse dont je partage l'ensemble des propos.
Je ne voulais pas donner un ton fataliste à mon propos. Je voulais simplement exprimer le fait que, lorsqu'une force, une idéologie s'applique sans véritable opposition en face il est tout a fait normal de voir les effets ou les conséquences de celles-ci s'exprimer sans contraintes puisque personne n'est là pour dire stop. C'est tout le drame des référendums, une habitude s’installe en Europe qui consiste à mépriser l'avis des peuples européens (parce qu'on le sait résigné et docile). Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas, a un moment ou un autre, une véritable contestation, forte, profonde pour remettre un peu d'ordre dans tout cela.
Je vais encore sembler fataliste mais tant que le peuple sera résigné (le "à quoi bon!"), qu'il se complaira dans son confort (qui est une belle diversion selon moi) et qu'on fera en sorte qu'il mange à sa faim. Je n'ai pas trop l'impression que cela va s’arrêter.
Pour moi, une forme de contestation serait de rassembler un maximum de personne autour de l'idée d'autosuffisance (énergétique (via les énergie vertes entre autre), alimentaire et de bien de consommation via l'impression 3D par exemple...), avec une démocratie locale directe, etc. Bref un mode de contestation non violent par nature mais qui n'en sera pas exempt (le système concurrent va forcément réagir et montrer les dent à un moment donné) mais qui pourrait prendre le pas, au final, sur celles et ceux qui veulent avoir prise sur nos vies et notre avenir.
Fatalisme
Bonjour Bertrand,
On ne saurait mieux dire, je pense.
Pour ma part, je crois que le seul moyen véritable de révolte serait la passivité. La désobéissance civile. Celle-ci a été théorisée par Étienne de la Boétie et appliquée avec succès par Gandhi.
Quand je ne sais plus trop quoi penser tant les gens me paraissent illogiques, apathiques et terrorisés par l'idée même de leur ombre, je me demande ce qu'auraient fait des sauvages à leur place (sauvage étant ici une référence à des peuples n'ayant pas encore eu l'habitude de vivre sous la férule de politiciens véreux; et biberonnés aux fausses informations).
Si vous voulez, vous pouvez également imaginer ce que donnerait une République des Chats. On souhaite bon courage aux politiciens et on se marre à l'avance de la tronche qu'ils tireraient après une journée seulement.
C'est cela, la clé. Il faut commencer par évacuer la peur qui paralyse, qui empêche tout raisonnement sain et logique, puis il faut décider pour soi, en tant qu'homme, libre par essence et maître de sa destinée.
Tout le reste n'est qu'illusion et faux-semblants.