Hôpital Al-Ahli, l’hypothèse curieusement ignorée des médias

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Crédit photo : Abdelhakim-Abu-Riash / Al-Jazeera

On n’en finit plus, ces jours-ci, dans les médiamenteurs de chercher par tous les moyens à disculper Israël de la responsabilité du bombardement de l’hôpital Al-Ahli de Gaza, le 17 octobre dernier.

Au début, ces derniers ont fait bloc derrières les explications vaseuses (avec grands renforts de photos et d’enregistrements audio) obligeamment fournis par l’armée israélienne : « vous voyez, c’est pas eux, d’ailleurs ils ont les preuves ».  Ça me fait toujours penser au running-gag des Guignols de l’info quand ils parlaient des époux Balkany : « Je suis innocent, et d’ailleurs j’ai un témoin qui peut le prouver, mon épouse Isabelle! ».

Mesurant le peu de crédit que leur maladroit parti-pris inspirait dans l’opinion publique, ils ont commencé à affiner un peu leurs bobards, en y ajoutant un semblant de vernis d’analyse critique, tout en continuant à nous abreuver avec des éléments de langage toujours obligeamment fournis par l’armée israélienne.  

À cet égard, l’article d’AFP-factuel est un modèle du genre.   Et n’oubliez pas, AFP-factuel c’est forcément la vérité vraie, puisque c’est vérifié (par eux) sur base d’éléments fournis par l’armée israélienne. 

Dans l’article, on commence par pinailler sur le nombre de victimes, citant des chiffres parfois totalement loufoques (quelques dizaines de morts) aux côtés d’autres estimations, comme celle des renseignements américains : entre 100 et 300 morts.   Ah c’est sûr qu’ils sont rudement bien placés pour savoir combien de victimes il y a eu…  Je suppose qu’avec leurs satellites, ils auront pris une photo haute résolution du site, compté les pieds, et puis divisé par ± 2 pour déduire le nombre de victimes.   En vrai, ils se foutent de qui?   Parce qu’à côté de ça, leurs satellites, n’ont pas été fichus de déterminer d’où était venue la roquette, à moins bien sûr qu’ils n’aient pas intérêt à révéler cette information?

Ils peuvent toujours compter les pieds, les mains, les têtes éparpillées, c’est un massacre, et c’est un crime de guerre.   Personne n’oubliera jamais ça, et surtout pas dans le monde arabe.  On parle de civils innocents qui s’étaient réfugiés dans les jardins de l’hôpital pour y passer la nuit, pensant que là ils seraient à l’abri des bombardements.

Hypothèse de la roquette défectueuse du Hamas

Ces roquettes n’ont pas de système de guidage, pas de plateforme inertielle, pas de GPS, c’est l’équivalent des fusées d’artifice, mais en plus gros, avec une charge explosive encapsulée dans du métal.  L’armée israélienne et la propagande ne manquent jamais une occasion de nous les présenter comme des armes terrifiantes, mais dans les faits, elles n’auront causé que quelques dizaines de morts au total en plusieurs décennies, alors que le Hamas en a envoyé des dizaines de milliers sur cette période.  

Oui, mais me direz-vous :

  • Quelques dizaines de morts, ça reste un crime de guerre.   Je n’en disconviens pas, mais durant cette période, combien de Palestiniens innocents tués dans des frappes indiscriminées?  
  • La roquette est tombée pile au milieu de l’allée qui sépare les deux jardins où les réfugiés s’étaient installés pour la nuit.  Pas besoin d’une bombe puissante pour faire des ravages.   Oui, sauf que les dégâts sont peu compatibles avec une roquette artisanale.  Toute la zone a été criblée de shrapnels, y compris les bâtiments de l’hôpital et les voitures sur le parking.

Hypothèse de la roquette du Hamas interceptée par un missile Patriot (dôme de fer)

Celle-là, les médias l’aiment beaucoup, ça leur permettrait de charger le Hamas tout en leur rendant qu’ils ne l’ont probablement pas fait exprès.   C’est ce que j’appelle une délicate attention.   Et d’ajouter que vu le cratère d’impact, ce ne peut pas être une bombe (genre GBU) de l’aviation israélienne, donc c’est forcément une roquette!

Hypothèse jamais évoquée : un missile Patriot israélien

La propagande, aussi bien israélienne qu’américaine ne manquent jamais l’occasion de vanter l’infaillibilité du « dôme de fer », soit des batteries Patriot (Pac-2 et Pac-3) déployées dans les zones à protéger.

Mais en pratique, et on l’a bien vu en Ukraine, ces missiles ne sont pas très fiables : pire, ils peuvent, tout comme les missiles S300 de fabrication soviétique revenir à l’envoyeur façon boomerang.   Une vidéo, tournée en Arabie Saoudite, lors de la guerre contre le Yémen, est assez éloquente.

C’est tout de même étrange qu’on ait passé sous silence cette hypothèse tout aussi valable que celle de la roquette du Hamas?   Il faut dire que ce serait gênant à plus d’un titre :

  • La responsabilité de la frappe reviendrait à Israël
  • L’infaillibilité du système de défense israélien serait un mythe (de plus)

Notez que du point de vue du nombre de victimes causées, cette hypothèse est nettement plus crédible que celle d’une roquette du Hamas.   Les missiles patriot sont porteurs d’une charge d’explosif brisant, encapsulée dans du métal, ce qui en fait une redoutable arme à fragmentation, et ce qui explique aussi la petite taille du cratère.

Fin mot de l’histoire

Les médias de grands chemins pourront bien continuer à nous inonder de bobards, il existe un moyen tout simple de déterminer l’origine de la roquette.   Il suffit d’en collecter les débris et de les analyser.

Mais j’ai la nette impression que même si le Hamas venait à présenter un morceau de missile patriot portant encore son numéro de série, les médiamenteurs nous diront en coeur que c’est un faux, ou alors que le débris n’a pas été collecté sur place.   La défense, contre vents et marées des intérêts de l’État d’Israël n’est pas une option, c’est un impératif.

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Philippe

Webmaster du Vilain Petit Canard, citoyen de nationalité belge, marié et père de deux enfants. Je vis en Belgique et j’exerce la profession d’Informaticien à Bruxelles. Mes articles