Quand l’intouchable Monsanto se fait exclure du Parlement européen

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Les lobbyistes de la tristement renommée multinationale Monsanto trouveront désormais porte close au Parlement Européen ! Voilà une nouvelle pour le moins inattendue qui devrait redonner un peu d’espoir aux nombreux opposants de la firme.

Les causes de cette affaire relèvent d’une arrogance hors du commun de la part du géant pro-ogm qui, se croyant intouchable et au dessus de tout, avait refusé de se rendre à une audience qui devait se tenir le 11 octobre dernier, et durant laquelle il devait s’expliquer des soupçons qui pèsent sur lui d’influencer les recherches autour du glyphosate, composant du désherbant Roundup, et actuellement source de nombreux débats houleux.

La multinationale justifie alors de son absence à cette convocation sous le prétexte de craindre de voir son intégrité remise en cause, s’octroyant même le luxe d’accuser le Parlement européen de « populisme » dans sa volonté de faire toute la lumière dans ces dossiers. Un comble !

L’Eurodéputé Tarabella (chef de délégation PS au Parlement), étant à l’origine de cette audition avec Eric Andrieu, s’est expliqué d’ailleurs avec une certaine virulence à propos de ce refus

Suite à son refus de venir à notre audition du 11/10, notre Groupe S&D obtient l’interdiction d’accès de @MonsantoCo au Parlement européen. pic.twitter.com/Dc9XqXyNB3

Eric Andrieu (@EricAndrieuEU) 28 septembre 2017

Il explique dans un communiqué que

Il faut mettre au pas ces multinationales, peu scrupuleuses, qui se moquent de la santé des consommateurs. Après la parution des « Monsanto Papers », il ne fait plus aucun doute que de nombreux produits Monsanto sont particulièrement dangereux pour les citoyens. Avec mon collègue français Eric Andrieu, nous nous battrons pour obtenir gain de cause. La réaction européenne a souvent été dans la posture. Il faut du concret et des sanctions.

Ajoutant également

Nous ne devons plus attendre que les scandales éclatent pour agir ! L’Europe doit arrêter de dérouler le tapis rouge à ces grandes multinationales et montrer qu’elle constitue un rempart sanitaire pour nos concitoyens ! À défaut, elle cessera d’exister.

Nous apprenions en effet plus tôt dans l’année et dans le contexte des « Monsanto Papers », que des eurodéputés demandaient la révision de l’expertise du glyphosate qui était favorable à ce dernier. Et pour cause, puisque la firme agrochimique est suspectée d’avoir délibérément falsifié des études sur la sûreté du pesticide lié à des risques cancérigènes.

Dans un extrait d’un article du Monde, nous pouvons lire

(…) les eurodéputés font valoir que ces documents internes montrent que, dès 1999, les responsables de Monsanto s’inquiétaient du potentiel génotoxique du glyphosate. Et que l’un des papes de la discipline, le Britannique James Parry (université de Swansea, Royaume-Uni), embauché comme consultant par la société pour plancher sur le sujet, soulevait lui-même, en interne, de sérieuses inquiétudes sur le potentiel génotoxique du glyphosate, c’est-à-dire sa capacité à altérer l’ADN – phénomène impliqué dans la cancérogénèse.

Pour enfoncer le clou, le site Euractiv.fr, pourtant inflexiblement aligné sur la mondialisation, on peut lire un article en date de mars 2017 annonçant que « Pour éviter l’interdiction du glyphosate en Europe, ses producteurs auraient financé la publication de fausses preuves scientifiques, dénonce un rapport. »

Selon le rapport Buying Science publié par l’ONG autrichienne GLOBAL 2000, avec le soutien de Avaaz, GMWatch, Campact, PAN Europe et Pan Allemagne entre autres, Monsanto et d’autres producteurs de glyphosate auraient « déformé des preuves scientifiques » sur l’impact du pesticide sur la santé publique.

Les auteurs du rapport estiment qu’entre 2012 et 2016, les entreprises ont sponsorisé une série d’articles publiés sur des journaux scientifiques, qui concluaient que le glyphosate et ses dérivés commerciaux n’étaient pas cancérogènes.

C’est ce même Euractiv.fr qui divulgue depuis hier « Monsanto persona non grata au Parlement européen », alors que dans le même temps, le média britannique the guardian titre à son tour « Monsanto banned from European parliament », précisant que

C’est la première fois que les députés utilisent les nouvelles règles [entrées en vigueur en janvier 2017] de retrait du droit d’accès au Parlement aux entreprises qui ignorent une convocation à une audience parlementaire

Monsanto est donc banni jusqu’à nouvel ordre du parlement européen, et si la décision des députés est confirmée mardi 3 octobre, Monsanto – qui dépense la bagatelle de 400 000 euros par an pour ses activités de lobbyisme – ne pourra plus rencontrer les parlementaires ni assister aux commissions.

Pour le média belge Le Soir, cela ne semblerait pas vraiment une entrave pour Monsanto, ironisant que les lobbyistes organiseraient des réunions informelles dans les bars à proximité du parlement…

Ne crions donc pas victoire trop tôt, mais savourons malgré tout cet instant symbolique.

Le Veilleur

Article original sur le site du Veilleur

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