La DH et les armes biologiques. Le ridicule ne tue plus.

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La Dernière Heure dévoile en exclusivité (tu m’étonnes) le scoop du siècle et parvient à consolider encore son statut de lanterne rouge du journalisme amateur dans un pays ou les candidats à une place assise dans la camionnette balai se livrent à une concurrence féroce.

L’article, publié le 9 avril s’intitulait « Arme biologique dans le sac à dos d’Abderrahmane Ameuroud: voici la preuve« .

Il faisait suite à un précédent, publié la veille, mais sous forme de teaser – l’accès à l’intégralité de l’article étant limité aux abonnés – et la partie croustillante commençait précisément à la fin de celui-ci.

Extraits de cette perle du journalisme d’investigation

Dans ses éditions de vendredi, la DH révélait que lors de l’interpellation d’Abderrahmane Ameuroud à Schaerbeek le 25 mars la police a trouvé dans le sac à dos du complice du terroriste Reda Kriket des objets peu ordinaires, à savoir des excréments et des testicules d’animaux.

Nous affirmions qu’il s’agissait là d’éléments suspects laissant penser que Ameuroud, aussi connu sous l’identité d’Ameur, pouvait se livrer à la préparation d’une arme biologique. Nous ne retirons rien de nos affirmations qui ont été non pas démenties mais nuancées par le parquet fédéral.

Les informations n’ont pas été « nuancées » par le parquet fédéral, elles ont été formellement démenties sur base d’analyses de laboratoire (ndlr).

Pas grave, on en conclut que les autorités n’ont pas voulu créer la panique parmi la population, mais que les faits sont là, et ils sont têtus !

Le conditionnel est ici de rigueur. En effet, contrairement à ce que dit le parquet, nous pouvons affirmer de sources policières sûres et recoupées que l’avis interne sur lequel nos informations sont diffusées est authentique.

Dans lequel on comprend que le conditionnel, c’est pour les autres.  Puisque forcément, nous on a un scoop.  D’ailleurs on a les preuves !

Extrait de l’avis en question (d’après la reproduction de la DH)

Dans le sac à dos d’Ameur a été retrouvé un sac en plastique contenant trois cartes d’identité parmi des défécations et des testicules d’animaux.  Si on stocke une combinaison de défécations, d’eau et de viande animale pendant dix jours dans un endroit sombre, cela peut provoquer une réaction toxique.

Des « armes biologiques » façon Severus Rogue

Prenez quelques crottes de bique et des testicules de crapaud.  Mettez dans le chaudron avec un peu d’eau, et laissez mitonner 10 jours.

En fait, on serait assez rassurés si l’on pensait une seconde que les compétences des terroristes se limitent à l’indigence intellectuelle dont fait preuve l’auteur de l’article.

Pense-t-il vraiment que la confection d’armes biologiques relève de la magie, où il suffirait de mélanger tout et n’importe quoi avec pour seule condition que ce soit bien dégueu ?

Il ne faut pas chercher bien loin pour trouver des exemples dans l’histoire, depuis l’antiquité, de militaires utilisant des charognes ou des cadavres pestiférés comme armes de guerre.

Penser qu’aujourd’hui cela pourrait être de quelque utilité sachant qu’on soigne plus facilement la peste qu’un rhume avec des antibiotiques (amoxicilline) relève de l’ignorance crasse.

Avoir un pathogène c’est une chose, le transformer en vecteur utilisable c’est tout autre chose.

Le vrai danger

L’actualité récente, et notamment l’attaque menée par la faction Jaysh al-Islam à Alep le 7 avril dernier contre des combattants Kurdes du YPG prouve que ces terroristes n’hésitent pas une seconde à utiliser des armes proprement terrifiantes que même A. Hitler avait toujours refusé d’utiliser.

La question dans ce cas, et qui mériterait une enquête approfondie, serait de savoir qui a livré les précurseurs d’agents chimiques nécessaires à la confection de gaz moutarde ?

Pour ce qui concerne la guerre bactériologique, le danger réside plutôt selon moi dans des agents pathogènes qu’on peut facilement isoler et cultiver, tels le bacille du charbon (Anthrax).

Ce n’est pas un hasard si c’est par là que les Anglais, les Américains et les Russes avaient commencé.

Conclusion

La lutte contre le terrorisme est nécessaire et je pense que les forces de l’ordre accomplissent un boulot remarquable.

Toutefois il faut bien comprendre qu’on applique plus ou moins des emplâtres sur des jambes de bois.  Le terrorisme est d’abord le symptôme d’un mal qui ronge notre société.

Aussi il ne faudrait pas perdre de vue la recherche des causes.  Pour qui roulent les terroristes ?  Quelles sont leurs motivations politiques ?

Poser la question c’est déjà mettre en lumière des éléments de réponse, parce que justement, cette motivation politique n’existe pas.

Et ça c’est interpellant, parce que c’est totalement inédit.

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Philippe Huysmans

Webmaster du Vilain Petit Canard, citoyen de nationalité belge, marié et père de deux enfants. Je vis en Belgique et j’exerce la profession d’Informaticien à Bruxelles. Mes articles