Pourquoi je ne voterai plus

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Ce dimanche 14 octobre, tous les Belges sont appelés à voter pour renouveler les conseils communaux et provinciaux. Mais cette fois (et pour les suivantes), ce sera sans moi.
Un peuple qui élit des corrompus, des renégats, des imposteurs, des voleurs et des traîtres n’est pas victime, il est complice (George Orwell).
J’ai une sainte horreur de toutes les formes de dirigisme, et j’aurais tendance à me considérer comme un chat parmi les hommes : vous avez déjà essayé de forcer un chat à en passer par vos quatre volontés ? Fais le beau ! Assis ! Au pied … Le résultat n’est pas vraiment encourageant, n’est-ce pas ? Raison pour laquelle il ne viendrait à personne l’idée de dresser un chat, je pense.
De même que n’importe quel gouttière, je suis farouchement attaché à mon indépendance, et ne suis les injonctions que lorsque la raison me dit qu’elles sont justes, ou simplement acceptables, dans l’intérêt public ou dans le mien.
Le problème avec les élections, ou plus exactement avec le système de dictature soft que l’on appelle pompeusement « démocratie représentative », c’est que je n’arrive plus, mais alors plus du tout à voir en quoi il serait de l’intérêt du public, du mien, ni en quoi il serait démocratique.
Qu’est-ce que la démocratie ?
la démocratie est « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple » (Abraham Lincoln)
Il s’agit donc de l’exercice du pouvoir par les citoyens, de leur participation aux processus de décisions qui régissent notre société, et rien d’autre. Or que vous propose-t-on aujourd’hui ? D’élire des maîtres qui ne servent que leur intérêt personnel et vous trahiront à la première occasion.
Jean-Jacques Rousseau l’avait déjà parfaitement exprimé :
La souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle ne peut être aliénée; elle consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se représente point : elle est la même ou elle est autre; il n’y a point de milieu. Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentans, ils ne sont que ses commissaires; ils ne peuvent rien conclure définitivement. Toute loi que le peuple en personne n’a pas ratifiée, est nulle; ce n’est point une loi (J.-J. Rousseau – Du contrat social ou Principes du droit politique).
Eh oui, ce que l’on vous vend comme démocratie n’est autre qu’une aristocratie élective. Le même petit club de parvenus, éternels candidats à tous les suffrages, à tous les mandats rémunérés, se renvoyant l’ascenseur quand ils ne se tirent pas dans les pattes pour s’arracher quelque rogaton; certains poussant l’analogie aristocratique jusqu’à faire élire leurs rejetons, même s’ils s’avèrent être stupides comme un panier, et parfaitement incompétents.
Combien d’ouvriers à la Chambre des Représentants ou au Sénat ? Combien de caissières ? Combien d’instituteurs ou de maçons ? Combien de femmes au foyer ? Et ces gens prétendraient nous représenter ?
Combien de fois le peuple a-t-il eu à s’exprimer sur des questions qui allaient durablement peser sur son existence ou celle de ses enfants ? Nous a-t-on consultés lorsqu’il s’est agi de casser le pays en petits morceaux (fédéralisation) ? Avons-nous été invités à donner notre avis lors de l’adhésion au traité sur l’Union Européenne (alors que c’était initialement prévu pour tous les États membres) ? Qui a décidé de renflouer les banques privées avec l’argent public au lendemain de la crise sans rien organiser de concret pour éviter que pareille situation ne se reproduise (et elle se reproduira bien assez tôt) ?
Est-ce cela que l’on appelle « démocratie » ? En pareil cas, je refuse tout simplement d’y prendre quelque part que ce soit, parce que participer, c’est aussi cautionner le système.
Obligation de vote
Cette obligation d’un autre âge est légale, sans doute, mais il ne me semble pas que nous ayons été consultés sur cette question, non plus ? Ni nos parents, d’ailleurs, ni même nos grands-parents… En fait c’est à peu près aussi fondé que d’exécuter sur le champ un conscrit qui refuserait de sortir de la tranchée pour aller égorger le troufion d’en-face, ou de déclarer, sans rire, que des êtres humains peuvent être la propriété d’autrui (l’esclavage était légal en France jusqu’en 1848 et la Belgique n’a rien à lui envier de ce point de vue si l’on considère l’attitude du colonisateur vis-à-vis des populations autochtones du Congo jusqu’en 1960).
Il ne faut pas se laisser abuser par des grandes envolées lyriques dans le genre « nos ancêtres se sont battus pour ce droit », parce qu’il n’en est rien. De temps à autre, lorsqu’ils étaient assez désespérés pour que la détermination l’emporte sur la peur de la répression, nos ancêtres se sont battus pour secouer le joug et influer sur le cours de l’histoire afin d’obtenir plus d’équité et de justice sociale. Pas pour élire des arrivistes corrompus.
Je considère que le premier droit en démocratie est le droit de s’exprimer, ce qui inclut d’office son corollaire, le droit à l’abstention. Je ne reconnais aucune légitimité aux décisions qui sont prises au nom du peuple par une clique d’oligarques obnubilés par leur seul intérêt particulier.
Et à ceux qui ne l’auraient pas encore réalisé, je dis que le pouvoir exorbitant de cette oligarchie sur la masse des citoyens ne repose que sur votre acceptation, votre docilité, votre soumission. On ne peut pas à la fois geindre sur son sort et donner mandat au loup pour prendre soin des brebis.
Soyez résolus de ne servir plus, et vous serez libres (Étienne de La Boétie – Discours de la servitude volontaire)
Les chats ne font pas autre chose.